La mort n’est pas l’opposé de la vie mais bien de la naissance. On oppose à la vie… la non-vie. La naissance comme la mort sont les passages de la vie à la non-vie. Si nous célébrons la vie dans toutes les cultures au delà des dogmes, nous célébrons aussi la mort. Chaque civilisation, chaque société a ses propres rituels de passages. Bien que nos sociétés contemporaines tendent à supprimer ces rituels, il est important de voir leur fonction dans nos processus d’accueil lors d’une naissance comme de deuil lors d’un décès.Je m’attacherai à parler des rituels de deuil dans cet article.
Que le décès intervienne de manière brutale ou suite à un long processus, l’accompagnement du défunt par des rituels réveille en nous des processus inconscient indispensables au deuil. Prenons en compte que ses rituels – quelques soient nos religions, obédiences, ou croyances – nous sont transmises depuis la nuit des temps. Notre inconscient collectif intègre cette dimension. Notre cerveau par ces rituels intègre la notion de mort et engage si rien d’autre ne l’y contraint la première étape du deuil.
Rappelons ces étapes :
- Déni(s)
- Tristesse
- Colère (sachant que la colère et la tristesse peuvent être inversées selon la situation)
- Reflexion
- Résolution
- Acceptation
- Ré-investissement
Le passage du déni se fait aussi à travers les rituels comme par exemple la veillée des morts. L’importance de ce rituel est à prendre en compte dans l’inscription au niveau de notre cerveau. Veiller nos morts lors de leur décès pour ne pas à avoir à les veiller le reste de notre vie, ce qui peut engendrer de grandes difficultés de sommeil par exemple. Au delà de cette réaction du cerveau face à l’événement, il permet un processus de libération émotionnel, psychologique, voir spirituelle selon nos croyances. Laisser partir l’âme de cet être cher, c’est lui laisser- et se laisser – l’opportunité d’une grande liberté. Le cerveau marqué par cet événement et fonction de l’historique de la relation avec le défunt, peut intégrer différents stress que l’on peut retrouver par la suite : troubles du sommeil, sensation de ne pas vivre sa vie, changement radical de comportement sans conscience, “culture” exagérée de l’image du défunt, hypersensibilité, déprime, dépression, troubles alimentaires…
Il semble donc important de ne pas négliger ces rituels. Si notre culture est hors de rituels religieux, il est tout à fait possible malgré tout de réaliser ses propres rituels. Prenons en compte que les rituels sont aussi des actes symboliques et que partant de ce principe, nous pouvons faire appel à toute notre créativité pour procéder à ces adieux. Je dirais même qu’ils peuvent être en supplément des rituels traditionnels, car plus personnels et intimes, ils permettent à l’adulte que nous sommes et l’enfant intérieur qui nous habitent de se retrouver dans cet acte. Cela nourrit la dimension d’amour et d’ouverture de notre coeur.
Mon partage : J’ai perdu des êtres chers dans ma vie, mais j’ai pu grâce à des rituels de deuil laisser partir ces âmes. Pour autant, elles ne sont pas effacées de ma mémoire. Bien plus présente encore que de leur vivant mais en me laissant ma liberté d’être. Je ne vis pas dans une forme de “parasitage”. Je n’ai pas besoin de les pleurer car je ne suis pas triste de leur mort. C’est un événement auquel je ne peux rien faire. Mais loin d’être résignée, je l’ai accepté. Comment ? En laissant plus de place à mon coeur qu’à mon égo, en consolant mon enfant intérieur, en ouvrant un dialogue virtuel avec ce défunt. Mon dernier acte symbolique a été d’écrire mais ressenti avec ces personnes -Beaucoup d’émotions s’en sont suivis- et enfin bruler ses écrits pour purifier mes paroles. Ce fut à la fois un acte symbolique, un rituel de deuil, et enfin une libération des émotions négatives qui pouvaient me parasiter. Le tout a pu permettre une forme de paix intérieure car l’adulte et l’enfant intérieur ont pu entamer et terminer le processus de deuil.
Comment savoir si le processus est terminé ? commençons déjà par le début et un pas après l’autre. Il n’y a pas de durée standard, tout dépend du chemin de développement personnel que l’on a accompli. Mais la dernière étape est le réinvestissement. Lorsque cette étape arrive on ne se dit pas :” ça y est mon deuil est fait !”. En réalité, on ne réalise que l’on a pu faire son deuil que lorsque cette étape est accomplie mais elle est subtile et moins évidente à voir que les précédentes.
Pour exemple: Une phobie des chiens vous tient aux ventres depuis longtemps. Après un processus de ré-information (en psychothérapie par exemple), vous ne connaitrez pas le résultat de votre chemin parcouru en croisant un chien et en disant : “j’ai pu caresser ce chien et je n’ai pas eu peur”. Non en réalité, vous croiserez des chiens sans les voir. Pour preuve, si vous n’avez pas peur des chiens et que je vous demande combien vous en avez croisé aujourd’hui, il y a fort à parier que vous ne saurez pas me répondre. Pour la simple et bonne raison que vous n’y avait pas fait attention car ce n’est pas une difficulté ni un élément essentiel.
Pour le deuil, c’est finalement un peu le même chemin. Mais ce n’est pas la personne que vous oubliez, ou effacez, c’est le manque, la souffrance, les blessures que cela rappelle.
Il y a probablement un jour, une heure, une minute, une seconde précise où cela bascule.
Mais, est-ce plus important de connaitre ce moment ou bien simplement qu’il se produise ?